" Sé pa la pen brillé an kay pou tchoué an rat"... Dossier sur la culture du compromis par Gladys RANLIN LEONIL Avocate


Rédigé le Jeudi 2 Février 2017 à 04:46 |
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Le fait est que la "culture du compromis" soit si éloignée de notre formation juridique (et processuelle) que nombreux sont les confrères qui en oublient les effets négatifs sur les hommes et les outils économiques... Même le législateur a mis en place un texte qui impose que désormais, il doit être démontré une tentative de rapprochement amiable avant toute saisine du juge.
C'est bien la preuve qu'il existe une "conscientisation politique" de la réflexion
Chez nous, il y a dans le choix d'aller au procès, une forme de règlement de compte qui fait perdre certains repères fondamentaux... Et au niveau des entreprises les effets peuvent être extrêmement graves...

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Mais Existe t'il un cadre juridique pour cette démarche transactionnelle. et quelle différence de prix entre les deux approches ?

Pas de cadre formel mais des textes existent et légitiment cette approche, la privilégient même... Pas de tarifs précis, ils sont libres et négociables. En matière gracieuse comme contentieuse ils sont encadrés par une convention d'honoraire obligatoire depuis la "loi macron" et qui réglemente les relations financières...
Par contre une fois le procès en cours en dehors des prud'hommes existe t'il une possibilité ou un retour possible ?

Oui toujours! Un magistrat ou un tribunal ne se plaint jamais d'être débarrassé d'un contentieux !
Cela dit pour négocier il faut être au moins deux... Et de bonne foi. La chose est plus compliquée si le procès est en cours parce que chacun connaît les "armes" de l'autre, mais aussi ses difficultés et parfois capacités de nuisance...

Surtout qu'un arrangement peut ne pas être "mauvais".. Mais se contenter d'être équilibré! C'est aussi cela notre métier... Veiller aux concessions Ré-ci-pro-ques!

Mais voici la réflexion et l’analyse de Maître Gladis RANLIN que MAKACLA.COM suit car son approche du droit est spécifique. Dans un premier temps collaborative, avec un cabinet qui travaille avec d’autres cabinets, (Affaire des banques et de l’année Lombarde) c’est dans un second temps une volonté d’informer gratuitement monsieur tout le monde. Voici donc là dans une jungle judiciaire une belle âme si brillante qu’elle en éclaire nos lanternes.
MAKACLA.COM en appelle à d’autres contributions, et remercie grandement Maître d’avoir accepté de diffuser dans nos colonnes un texte qui était destiné à ses amis.

Chers amis,

Si le temps judiciaire n'est pas le temps politique, comme en témoignent les affaires nationales (affaires très nombreuses de Nico, et plus récemment "penelopegate"), et locales (affaire dans laquelle le Président de l'Exécutif de la collectivité territoriale de Martinique est mis en cause)...

Le temps judiciaire n'est pas d'avantage celui des entreprises, et singulièrement lorsqu'elles rencontrent des difficultés, économiques ou d'autres natures en particulier, car ce sont celles que l'on voit le plus fréquemment, des conflits entre associés, ou difficultés de recouvrement...

Alors que la matière pénale peut rarement faire l'objet de règlements hors tribunaux, la matière civile s'y prête d'avantage, la matière commerciale est en revanche, le terrain de jeu par excellence, des règlement amiables des différends.
Il est temps pour moi d'en venir à mon propos:


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Des associés ne s'entendent plus, ou ne sont plus en accord sur la conduite des affaires qu'ils ont en commun. Une entreprise ne parvient pas à recouvrer une grosse créance sans laquelle son avenir est menacé...

Face à ces problématiques, mais mon propos est transposable vers d'autres, trois alternatives sont envisageables:
- Le choix de la fin de la relation contractuelle, celui de la dissolution de l'entreprise... l'euthanasie, quoi...
- L'alternative judiciaire, pour laquelle les délais sont imprévisibles, la décision toute aussi imprévisible, même si chacun est convaincu de disposer des meilleures armes... c'est le choix de l'inconnu ( mais qui est parfois inéluctable...)
- L'alternative amiable, pour laquelle les délais sont prévisibles (ou du moins dépendent des protagonistes, et non d'une institution sur laquelle nul n'a de prise voire d'emprise), mais des concessions réciproques (souvent délicates, ou simplement difficiles) sont nécessaires.

L'avocat d'expérience vous conseillera naturellement la troisième hypothèse, et seulement en cas d'échec de celle-ci, la seconde pour une raison simple:
La vie de l'entreprise se poursuit naturellement pendant le temps de la discorde, et/ou de la procédure, mais encaisse systématiquement les effets négatifs de celle - ci (bouche à oreilles, réputation, perte de marchés, désintérêt de ceux qui sont convaincus qu'ils perdront, ou assurés qu'ils gagneront le jackpot...)
Le temps d'un jugement, d'un appel, voire d'une décision de la Cour de Cassation, l'entreprise n'est parfois plus qu'une "coquille vide", à l'agonie.

Le bon gestionnaire doit envisager de "lâcher" un peu, pour gagner la sécurité de son entreprise, de son volet social... sous le contrôle et l'expertise de son conseil...
Car plus encore que son incapacité à s'adosser au temps de la justice, l'entreprise, et singulièrement locale, ne parvient pas toujours à s'accommoder des retournements judiciaires, qui, eux, peuvent être triviaux, ou mortels.

J'ai personnellement vu trop de dossiers qui pouvaient être raisonnablement transigés, et des entreprises qui, arrivées devant des tribunaux dans une situation telle que plus aucun accord n'était envisageable (pèson pa lé ladjé), ont fini par être liquidées avec pertes et fracas...aux frais des salariés, des efforts et investissements réalisés et parfois de tiers lésés...

On appelle cela chez nous "brillé an kay pou tchoué an rat"...

L'avocate militante que je suis milite aussi pour que cette mentalité change...Il en va de la santé de notre fragile tissus économique.

Avec fierté, je vous dis que ma conception de l'avocat (moderne) n'est pas celle d'un "faiseur de procès" (même si la procédure demeure son coeur de métier). C'est aussi, et surtout, un "régleur de problèmes" (sur des bases et arguments juridiques c'est évident); celui qui vous amènera et vous accompagnera dans le parcours tendant à privilégier la survie économique de votre entreprise, à l'accès au prétoire...
Car l'évitement du procès est, en soi, je le crois sincèrement, une forme très respectable de succès. L'évitement du procès est aussi celui du cortège d'inconnues de toutes natures, et presque systématiquement, l'évitement de difficultés économiques corrélatives.

Attention... Qui dit transiger ne dit pas se passer de professionnels du droit. Car une négociation et par suite une transaction, c'est aussi (voire plus) technique qu'une procédure judiciaire!
Une transaction mal ficelée peut se révéler aussi désastreuse qu'une procédure mal terminée... Et même vous ramener, de force, devant un tribunal...

Fin de l'article

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Femme d'action.
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