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Une diversion au lieu de faire face aux écrasantes responsabilités de l'État dans le scandale nommé chlordécone.

L'INCROYABLE PROCÈS À LA LIBERTÉ D'EXPRESSION par Philippe Pierre-Charles - Max Rustal.


Rédigé le Vendredi 11 Septembre 2020 à 15:30 |
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La Martinique aurait tort de s'installer dans la routine du spectacle des procès à répétition et à rallonges qui permettent aux autorités de tenter une diversion au lieu de faire face aux écrasantes responsabilités de l'État dans le scandale nommé chlordécone.


Outre son côté surréaliste, le procès du 7 septembre a tout l'air d'être celui d'une certaine modernité. C'est le procès d'un lanceur d'alerte que l'on aurait cru improbable en France, le procès de l'investigation libre et critique qui insupporte les puissants, de la vigilance citoyenne face aux violences policières qui prennent un nouvel essor en France et dans les colonies.

C'est le procès des vidéos et des réseaux sociaux. Le procès du rejet de l'attentisme devant ce qui indigne et révolte. Le procès du droit à l'insoumission devant l'inhumain et l'insupportable. C'est parallèlement l'offensive d'un pouvoir cherchant à s'imposer jusque par la brutalité judiciaire, faute d'être en mesure de convaincre en s'attaquant aux vrais problèmes et aux réelles responsabilités, les siennes en premier lieu.

« Christian le gilet jaune » — serait-ce aussi le procès des Gilets Jaunes ? — est donc convoqué devant le tribunal correctionnel de Fort-de-France ce 7 septembre 2020, pour avoir produit et diffusé une vidéo qui, mieux que de longs discours, montre et documente à la fois le zèle répressif de certains pandores tant locaux qu'allogènes, illustre les licences qui sont prises avec la déontologie paraît-il enseignée dans les écoles de police. Le talentueux reporter-amateur agrémente le tout de quelques commentaires brefs mais incisifs, pratique des retours sur image, des ralentis, des répétitions. Sans outrances verbales ni exagérations, les images faisant l'essentiel.

En voilà bien trop pour les censeurs. Ayant pour le moment échoué à faire passer une loi interdisant, dans le pays de la liberté et des droits humains, de filmer la police dans ses œuvres, le pouvoir semble vouloir promotionner une expérience judiciaire innovante dans les écuries coloniales, en sanctionnant dans les faits ceux qui font courageusement usage de cette prérogative, au demeurant parfaitement légale et encadrée. Comme s'il y avait, et qu'il y aurait, quelque chose de répréhensible et de honteux à cacher.


Tout enseignant normal apprend à son jeune public, quand on lui en laisse le temps, à lire des documents de façon critique, à comprendre qu'il n'y a pas d'image neutre parce qu'il n'y a pas plus de réalité neutre que d'observateur neutre, et qu'il faut toujours regarder qui parle et dans quel contexte et au profit de qui, en se méfiant de qui prétend être « au dessus de la mêlée ».

Une diversion au lieu de faire face aux écrasantes responsabilités de l'État dans le scandale nommé chlordécone.
La ficelle paraît grosse mais ce n'est hélas pas une fiction : « ...diffamation, incitation à la haine... » tout ça est bien écrit dans l'acte d'accusation. Pure affabulation permettant de contourner la légalité puisque : « Soumis à des règles de déontologie strictes, un fonctionnaire de police doit s'y conformer dans chacune de ses missions et ne doit pas craindre l'enregistrement d'images ou de sons ». (Circulaire du ministère de l'intérieur en date du 23 décembre 2008) ; ce que l'accusation ne saurait évidemment ignorer. Tout comme elle le sait bien, ce sont les décès tragiques et évitables, les éborgnements de manifestants au LBD, les tabassages en bande de personnes pacifiques, les arrachages de mains par les grenades, les sévices corporels irréversibles infligés sans raison à coups de matraque, la protection hiérarchique au plus haut niveau, et l'impunité quasi générale dont jouissent les fautifs, qui incitent à la haine.

Tout enseignant normal apprend à son jeune public, quand on lui en laisse le temps, à lire des documents de façon critique, à comprendre qu'il n'y a pas d'image neutre parce qu'il n'y a pas plus de réalité neutre que d'observateur neutre, et qu'il faut toujours regarder qui parle et dans quel contexte et au profit de qui, en se méfiant de qui prétend être « au dessus de la mêlée ». De sorte que nul n'aura l'idée de confondre la vidéo de «Christian le Gilet Jaune » avec les anesthésiants que l'on servira en continu sur les chaînes privées toxiques, et encore moins sur celles dites publiques, c'est-à-dire aux ordres de l'exécutif.


Ainsi, Monsieur le procureur de la République, si tapageusement soucieux de l'ordre républicain, devrait en toute rigueur remercier les citoyens responsables, à commencer par « Christian le Gilet jaune », apportant leur concours à la justice en dévoilant des comportements peu recommandables, susceptibles de jeter le discrédit sur les présumés garants de l'ordre public.

Une diversion au lieu de faire face aux écrasantes responsabilités de l'État dans le scandale nommé chlordécone.
Tout observateur quelque peu attentif a déjà repéré les policiers systématiquement perchés sur les toits, filmant à tire-larigot, pour confondre des manifestants fautifs et compléter les fichiers de la DCRI (Direction centrale du renseignements intérieur). La guerre des images est une réalité de notre temps, mais les parties en cause ne sont pas du tout à égalité. Car non seulement les policiers cameramen n'encourent aucunement les foudres exclusivement destinées aux militants et autres esprits vigilants, les vidéos prouvant collatéralement les coupables débordements de leurs collègues du terrain à la recherche du « contact », demeurent archivées aussi discrètement et longtemps que possible. Ainsi, Monsieur le procureur de la République, si tapageusement soucieux de l'ordre républicain, devrait en toute rigueur remercier les citoyens responsables, à commencer par « Christian le Gilet jaune », apportant leur concours à la justice en dévoilant des comportements peu recommandables, susceptibles de jeter le discrédit sur les présumés garants de l'ordre public. Les autorités judiciaires que nous n'aurons pas l'outrecuidance de soupçonner de provocation génératrices de nouveaux troubles, se montreraient ainsi au moins à la hauteur de leurs homologues étasuniens dont le niveau d'impartialité et de discernement est si bien établi.
Enfin, il va de soi que toute issue autre que la relaxe pure et simple, avec excuses publiques de surcroît, de « Christian le gilet jaune », signifierait qu'un pas insupportable aurait été franchi, rappelant les jours sombres où chaque mouvement social risquait de se solder impunément par des cadavres dans les champs ou dans les rues, et qu'une dénonciation de scandale impliquant une grosse fortune békée, pouvait se conclure par le corps supplicié et ligoté d'un journaliste non asservi au capital, rejeté par la houle nocturne. Nous n'en sommes fort heureusement pas là, mais il est bien clair que la tentation demeure la même, et encore plus puissante que jamais, de museler les revendications et d'étouffer l'information.
En dépit de récentes péripéties judiciaires en France comme ici même, n'incitant guère à l'optimisme, nous voulons croire que les magistrats chargés de ce dossier très hautement sensible et symbolique en matière de libertés publiques auront l'audace de faire preuve de leur souci d'indépendance vis-à-vis de gouvernants particulièrement belliqueux et partisans, s'agissant bien sûr de la défense des nantis et autres protégés du sérail.
En tout état de cause, la plus grande vigilance populaire reste de mise.

Fort-de-France le 03/09/2020
Philippe Pierre-Charles - Max Rustal.




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